Quel est le lien entre le naturisme et la nudité?
La question peut sembler saugrenue et pourtant, aussi étonnant que ça puisse sembler, les deux ne vont pas forcément de pair...

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Alors oui, bien sûr, quand on pratique le naturisme, on est nu.
En tout cas la plupart du temps, dès que les conditions le permettent (conditions météorologiques et cadre adéquats).
Par contre, être nu ne signifie nullement pratiquer le naturisme!

Je ne me souviens plus si c'est France Guillain ou Desmond Morris qui, dans un de ses livres, établissait différentes formes de nudité:
la nudité hygiénique: c'est celle que l'on pratique quand on se déshabille pour se changer, faire sa toilette, prendre un bain ou une douche
la nudité médicale: c'est celle qui est demandée par un soignant, parce que nécessaire à un diagnostic ou à un soin
la nudité sexuelle: inutile de préciser, je pense, à quoi on se réfère

On comprend déjà bien, à ce stade, que ces différents types de nudité n'ont rien à voir avec le naturisme.

Quand l'auteur(e) aborde le sujet du naturisme, c'est par étapes:
la nudité récréative "égoïste": c'est celle qui est pratiquée en solitaire dans l'intimité d'un lieu (à l'intérieur de son logement après avoir occulté les ouvertures vers l'extérieur, sur une terrasse bien protégée des regards, dans une crique isolée ou sur la plage d'une ile déserte, etc.)

Là, on se rapproche du naturisme puisqu'il est maintenant question de vivre nu, même si c'est dans un espace-temps délimité. On s'en rapproche mais on n'y est pas encore tout à fait car il manque deux dimensions essentielles du naturisme: le groupe et la durée.

On en arrive donc subrepticement au pas suivant:
la nudité récréative partagée, que ce soit en couple, en famille, entre amis, voire même au milieu d'inconnus.
Cette nudité va se pratiquer tant aux thermes, par exemple, que sur des plages plus ou moins discrètes, au milieu d'autres personnes qui en font de même. Et cela va rapprocher ses pratiquants du naturisme.
Rapprocher, certes, mais pas atteindre. Car il manque encore un aspect important: la durée. 

En effet, cette pratique-là de la nudité est avant tout récréative, quand elle n'est pas simplement motivée par un côté utilitaire (ne pas avoir de marque de bronzage). Elle est souvent liée à un moment et un cadre particuliers: dès qu'on aura fini de nager, dès qu'on aura suffisamment bronzé, on se rhabillera, la nudité n'étant plus utile et nécessaire.
C'est ce que certains appellent le nudisme, par opposition au naturisme.

Mais quand on ajoute la durée à une pratique commune de la nudité, autrement dit quand on pratique nu toutes les activités quotidiennes au milieu d'autres personnes tout aussi nues, aussi longtemps que les circonstances le permettent, et quand s'installe une forme d'interaction avec les personnes qui nous entourent, dans le respect mutuel, alors là on peut dire: "je pratique le naturisme".

On est alors étonné du nombre d'activités qui peuvent être pratiquées dans le plus simple appareil!
Bronzer, papoter, nager, flemmarder et lire, bien sûr.
Mais aussi faire ses courses (dans les structures appropriées), cuisiner, partager un apéro ou un repas, danser, jardiner, bricoler, se promener (et même randonner), pratiquer certains sports, s'adonner à une pratique artistique (musique, chant, peinture, sculpture, etc...), jouer, grimper aux arbres, faire du vélo ou du cheval... Et même (télé-)travailler quand on a la chance de pouvoir le faire dans de bonnes conditions.
La liste des possibles n'a de limite que notre imagination (et certains aspects pratiques, bien entendu).

Et c'est seulement alors que l'on comprend, que l'on ressent, même, que le naturisme c'est bien plus qu'être nu. Ou, plutôt, que la nudité, si elle est une condition, n'est pas un but mais bien un moyen: un moyen d'entrer dans un autre mode d'interaction avec soi-même, avec les autres et avec notre environnement.

Et les bénéfices que l'on tire, à titre individuel ou collectif, de cette pratique du naturisme dépassent de loin les plaisirs, déjà grands en soi, procurés par la liberté de mouvement, l'absence de marques de maillot ou les contacts intégraux avec les éléments (eau, vent, chaleur, fraicheur, etc...).
Nombreux sont en effet les témoignages de celles et ceux qui, à travers le naturisme, ont appris à s'accepter, à s'aimer eux-mêmes, à se sentir mieux dans leur peau et... à mieux apprécier les autres.
Et ce quel que soit l'âge de leur découverte de cette pratique. Car, s'il n'est jamais trop tôt pour se lancer dans le naturisme, dans toutes ses dimensions, il n'est jamais non plus trop tard pour le faire!

On peut même dire que plus on adhère tard, plus on mesure ce qu'on a perdu jusque là!

Donc, si on devait résumer:

  • aimer être nu seul chez soi n'est pas pratiquer le naturisme (mais ça peut aider à "apprivoiser" son corps et les sensations nouvelles procurées par la nudité prolongée au-delà de sa stricte nécessite, pour raison hygiénique ou médicale, par exemple)
  • aimer passer seul un moment nu en plein air, dans un lieu garantissant l'isolement, n'est pas vraiment non plus pratiquer le naturisme (même si on s'en approche)
  • aimer passer à plusieurs (famille ou amis) un moment nus en plein air, dans un lieu garantissant l'isolement, dans un but essentiellement récréatif, n'est toujours pas pratiquer réellement le naturisme (même si on s'en approche de plus en plus)
  • aimer vivre nu tout au long de la journée, s'adonner nu à toutes ou à la plupart de ses activités quotidiennes, si possible au grand air, en côtoyant d'autres personnes connues ou inconnues qui en font de même, dans le respect de soi, de l'autre et de l'environnement, alors là, oui, c'est pratiquer le naturisme car on en retrouve un des piliers essentiels évoqués plus haut et repris dans la définition officielle du naturisme:

« Le naturisme est un mode de vie en harmonie avec la nature,
caractérisé par la pratique de la nudité en commun,
qui a pour but de favoriser le respect de soi-même,
le respect des autres et celui de l’environnement » 

PS:
Il semble important d'ajouter que, aux sources du mouvement naturiste, une vie saine était également associée aux différents piliers évoqués ci-dessus. Les pionniers -les intégristes, diront certains- veillaient à ne pas fumer, à ne pas boire d'alcool, à ne pas manger de viande...
Cet aspect-ci a peu à peu disparu, en tout cas dans son côté obligatoire (mais il est toujours pratiqué par de nombreux naturistes du XXIème siècle).

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